Le Cell Danger Response : une nouvelle médecine pour les maladies chroniques !
Depuis deux siècles, la médecine moderne a accompli des progrès remarquables dans l’identification des causes des maladies. L’invention du microscope, la découverte des microbes, de l’ADN, des récepteurs, des enzymes, ont bâti une véritable science du déclenchement de la maladie : la pathogénèse. Mais dans la maladie chronique, cette approche montre ces limites. Chez nombre de patients atteints de fatigue chronique, douleurs persistantes, troubles neuro-inflammatoires ou auto-immuns, les investigations étiologiques restent infructueuses. L’agent causal n’est plus là, et pourtant le corps continue à souffrir. C’est dans ce contexte que les travaux du Dr Robert Naviaux proposent une révolution silencieuse mais fondamentale : et si la maladie chronique était moins une question d’agression que d’échec de résolution ? Et si pour guérir, il ne suffisait pas d’éliminer ce qui fait mal, mais d’aider le corps à restaurer ses voies de réparations ?

Comprendre la réponse cellulaire au danger (Cell Danger Response) (1-3)
La vie, depuis ces origines, est inséparable de la nécessité de se protéger. Toute cellule, tout organisme, tout être vivant dépend de sa capacité à sentir le danger et à y répondre. Cette réponse archaïque, préservée au fil de l’évolution, trouve son expression dans le mécanisme que le Dr Robert Naviaux a baptisé : le Cell Danger Response (CDR). Le CDR est une orchestration complexe de modifications biologiques destinées à assurer la survie de la cellule et de l’organisme. Il ne s’agit pas d’une simple inflammation ou d’une réponse immunitaire isolée. Il s’agit d’un changement profond de l’état cellulaire.
Tout commence par un déclencheur : une infection virale, une toxine environnementale, une blessure, un traumatisme psychique, un stress métabolique ou même une carence nutritionnelle aigue. Quel que soit le stimulus, la cellule détecte une altération de l’homéostasie, et c’est la mitochondrie sentinelle énergétique et environnementale, qui initie la cascade. En effet, la mitochondrie, détectant le danger, interrompt sa production normale d’ATP par phosphorylation oxydative. Elle induit un shunt vers la glycolyse anaérobie, plus rapide mais moins efficace. Le problème est que lorsque la menace est écartée, la cellule devrait recevoir des signaux clairs que le danger est écarté, ainsi elle pourrait relancer ces activités normales, réparer ce qui doit l’être, et retrouver sa place dans le tissu organique. Mais parfois, ce signal de paix n’arrive jamais. Le danger est dissipé mais la cellule n’est pas informée, les signaux de dangers persistent. C’est alors que le CDR, défensif au départ, devient pathologique. La cellule devient un acteur d’une pathologie chronique. Et c’est là que la médecine classique, focalisée sur la cause initiale, perd ses repères. Car une fois que l’infection est terminée, la toxine excrétée ou la blessure guérie, il ne reste que des symptômes persistants sans cause identifiable. Le patient est fatigué, douloureux, déréglé mais les analyses sont normales. Ce modèle CDR permet ainsi de réconcilier une multitude de pathologies sous un même paradigme : le blocage d’un processus adaptatif nécessaire, mais non résolu. Il introduit une médecine du « temps cellulaire », où l’urgence est de restaurer non pas ce qui est perdu, mais ce qui n’a jamais été pleinement accompli : la sortie de l’alerte.
Le CDR ou quand la maladie se fige dans la chronicité (4-5)

Là où la médecine classique voit une absence de cause, la théorie du CDR voit un processus bloqué. Et le basculement de perspective change tout. Selon Naviaux, de nombreuses maladies chroniques ne sont pas due à la persistance de l’agresseur, mais à l’échec de la cellule à sortir de l’état de défense qu’elle a engagé pour survivre. Autrement dit, la cellule n’est plus agressée, mais elle se comporte comme si elle l’était encore. Naviaux à réaliser des analyses métabolomiques de grande ampleur chez les patients souffrant de pathologies aussi diverses que le syndrome de fatigue chronique, l’autisme, la dépression résistante, la maladie de Lyme chronique etc. Malgré la diversité apparente de ces tableaux cliniques, un constat frappant émerge : ils présentent tous une signature métabolique commune. Ainsi ce n’est pas la diversité des maladies qui est surprenante, mais leur unité fonctionnelle. Quelle que soit la porte d’entrée (infection, toxine, stress), la réponse biochimique finale est la même. La cellule se replie sur elle-même, coupe les communications, réduit sa consommation d’oxygène, et empêche tout processus de réparation active. Le dénominateur commun n’est pas la cause mais l’échec de résolution. Le CRD est devenu un programme défectueux, resté enclenché au-delà de sa fonction utile. C’est un peu comme si le système immunitaire était coincé dans un rêve de guerre, où l’ennemi est parti depuis longtemps, mais où les sirènes continuent à hurler. Ce modèle du CDR figé offre une grille de lecture nouvelle pour les maladies chroniques qui échappent à la classification nosologique classique. Il donne du sens à la poly-symptomatologie, à la nature systémique de nombreuses pathologies chroniques. Et surtout suggère que la cause de la maladie ne suffit pas à expliquer sa persistance. Il faut aussi comprendre pourquoi la cellule ne parvient pas à déclarer la fin de l’alerte.
Deux paradigmes en tension (6-8)
La médecine moderne s’est bâtie sur le modèle de la pathogenèse : comprendre et isoler les causes des maladies. Pasteur, Koch, puis les généticiens du XXème siècle ont structuré une vision linéaire de la maladie : un agent (toxine, microbe, mutation…) cause une perturbation identifiable, qu’il faut contrer par un traitement ciblé. Ce modèle a permis d’extraordinaire avancée, notamment dans les maladies aigues : antibiotiques, vaccins, chirurgie, immunothérapies. Mais il montre ses limites lorsque l’on s’attaque aux maladies chroniques, dont l’origine est souvent floue, multifactorielle, et souvent non réductible à une seule cause.
C’est ici que Naviaux propose une autre catégorisation : celles des causes ultimes qui ne sont pas ce qui déclenche la maladie, mais ce qui empêche la guérison, il distingue la pathogénèse, d’un concept nouveau qu’il nomme la « salugénesis » (proche du concept de la médecine mitochondriale). La pathogenèse s’intéresse à l’atteinte initiale, la « salugenesis » s’intéresse à la façon dont la cellule, peut ou non s’en sortir. La guérison dès lors ne consiste pas à remonter le fil de la maladie. Elle passe par d’autres voies, souvent lentes, adaptatives et multiples. Cela réintroduit ainsi une médecine de la complexité adaptative. Elle reconnait que la cellule est un être vivant, plongé dans un contexte biochimique, relationnel et écologique, qui doit recevoir un ensemble cohérent de signaux pour pouvoir engager sa réparation. Le corps n’est pas une machine à reconstruire ; c’est un écosystème à rééquilibrer. En ce sens, il s’agit d’un autre volet de la médecine », non pour remplacer le premier, mais pour le compléter. Une nouvelle médecine où la réparation et la dynamique du rétablissement sont centrales.
Pourquoi la cellule ne guérit pas? le blocage de la guérison
La question fondamentale est de savoir pourquoi certaines cellules ne parviennent pas à sortir de l’état de danger. Pourquoi certaines blessures même minimes, s’éternisent-elles dans le silence biochimique du corps ? La réponse selon Naviaux, réside dans l’identification de freins actifs à la réparation cellulaire. Guérir n’est pas un processus passif. La cellule a besoin de signaux précis, de conditions environnementales favorables et d’une énergie suffisante pour s’engager sur le chemin de la réparation. Quand ces conditions manquent ou que certains signaux persistent, la cellule reste piégée dans le CDR.
Parmi les freins les plus notables :
- Comme explication à la persistance d’un signal de danger, un des plus puissant est l’ATP extracellulaire. Normalement confiné à l’intérieur de la cellule où il joue un rôle central dans le métabolisme énergétique, l’ATP extracellulaire devient toxique lorsqu’il est libéré dans l’espace extracellulaire, il agit alors comme une DAMP (damage associated molecular pattern) et active des récepteurs qui maintiennent l’état inflammatoire.
- Les infections silencieuses ou latentes : des virus comme EBV, HHV-6 ou la Borrelia (dans la maladie de Lyme) peuvent persister à bas bruit, entretenant un signal immunitaire faible mais constant, suffisant pour empêcher la résolution complète.
- Les toxines environnementales : métaux lourds, pesticides, solvants industriels etc. Ces composés peuvent bloquer les enzymes métaboliques clés, perturber la signalisation réceptive ou provoquer une réponse immunitaire chronique
- Le stress psychique chronique : le cerveau et le corps ne font pas de distinction claire entre une menace physique et une menace émotionnelle. Un stress prolongé peut maintenir l’activation du système nerveux sympathique, bloquant l’accès à l’état de repos et de réparation parasympathique.
- Une dysbiose intestinale : le microbiote intestinal est une source majeure de signaux immuno-régulateurs. Une dysbiose peut priver la cellule d’informations écologiques essentielles ou produire des signaux confus, maintenant l’alerte.
- La rupture du rythme circadien : la résolution d’inflammation et la réparation tissulaire sont des processus rythmés. Le manque de sommeil, l’exposition nocturne à la lumière bleue ou le travail en horaires décalés, perturbent la synchronisation hormonale et gênent la sortie du CDR.
Il faut donc envisager la maladie chronique non pas comme l’expression d’un agent encore actif mais comme l’incapacité de la cellule à reprogrammer son retour à la normalité. C’est là que réside toute la subtilité du modèle de Naviaux, il ne désigne pas le coupable, mais un processus interrompu.
Une médecine de la réparation : vers une stratégie de la résolution cellulaire

Si la pathogénèse vise à supprimer l’agression, l’approche de Naviaux vise à restaurer les conditions de guérison. C’est une médecine de la reconstruction du signal de paix, de la relance énergétique et de la communication cellulaire retrouvée. Dans ce paradigme, les stratégies thérapeutiques deviennent multiples, combinatoires, souvent non pharmacologiques et doivent s’adapter au terrain autant qu’aux symptômes. Il ne s’agit pas de cibler une molécule mais de remettre en route une dynamique physiologique.
Naviaux propose une feuille de route
- Retirer les obstacles de la guérison : cela comprend l’identification et la neutralisation des toxines, la détection des infections chroniques, la restauration d’un environnement psycho-sensoriel sécurisant et la correction des carences nutritionnelles profondes.
- Envoyer des signaux de sécurité : une cellule ne guérit que si elle sent que l’environnement est propice. Cela passe par un bon sommeil, une exposition à la lumière naturelle, des rythmes circadiens stables, une nourriture vivante, un contact régulier avec la nature, et des interactions humaines positives.
- Soutenir activement les processus de réparation : la cellule a besoin d’énergie (NAD+, acides gras, glucose stable), de micronutriments clefs (zinc, magnésium, sélénium etc.) d’un status redox adaptatif (glutathion, CoQ10 etc.) et de messagers intercellulaires cohérents.
Cela ouvre la voie à des stratégies d’accompagnements innovantes :
La photobiomodulation (6,7)
Cette technique consiste à exposer les tissus à une lumière rouge ou proche infrarouge, généralement entre 630 et 850 nm, à faible intensité (inférieure à 500 mW/cm²), afin de moduler le comportement mitochondrial et tissulaire. Les appareils les plus utilisés sont des dispositifs à LED ou laser de faible puissance. Des études ont montré que la PBM favorise la production de cytochrome C oxydase, réduit les espèces réactives de l’oxygène, régule les récepteurs purinergiques et améliore la perfusion tissulaire. Elle semble capable, dans certaines conditions, d’aider à désactiver le programme CDR et à rouvrir la voie de la réparation. Ce type d’approche, encore émergent dans les protocoles de soins classiques, offre un immense potentiel à condition d’être bien intégré à une stratégie globale : détoxification, nutrition, soutien psycho-émotionnel, et régulation neurovégétative.
La stimulation magnétique transcrânienne (8,9)
La Stimulation magnétique transcranienne est une méthode de neuromodulation non invasive qui utilise des impulsions magnétiques focalisées sur certaines régions du cortex cérébral afin de modifier l’excitabilité neuronale. Elle est utilisée pour réguler les réseaux neuronaux altérés, notamment dans les états de stress chronique, la dépression résistante, les douleurs neuropathiques ou le syndrome de fatigue chronique. Les appareils fréquemment utilisés sont Magstim, Nexstim, ou NeuroStar. Cette approche favorise une neuroplasticité restauratrice, améliore la régulation autonome et diminue les marqueurs inflammatoires. Dans le cadre d’un CDR figé, elle peut agir comme signal permissif de désactivation du programme de danger perçu.
La Nutrition cellulaire fonctionnelle (10,11)
La cellule en mode danger modifie son métabolisme : elle réduit la phosphorylation oxydative, augmente la glycolyse anaérobie, interrompt la synthèse protéique et lipidique, et réoriente ses ressources vers la défense. Pour retrouver sa capacité de réparation, elle doit restaurer son accès à des cofacteurs nutritionnels clés.
Parmi les nutriments les plus impliqués dans la sortie du CDR : le magnésium : cofacteur de plus de 300 enzymes, essentiel à l’ATP fonctionnelle, le zinc et sélénium : immunomodulateurs, cofacteurs de la glutathion peroxydase, les acides gras oméga-3 (EPA/DHA) : résolution de l’inflammation via les résolvines, le NAD⁺ précurseurs (nicotinamide riboside, NMN) : restauration de la fonction mitochondriale, le coenzyme Q10 et PQQ : soutien à la biogenèse mitochondriale, l’acide alpha-lipoïque, glutathion, N-acétylcystéine : restauration du redox intracellulaire
Ces compléments doivent être adaptés au profil du patient, validés par des tests biologiques (bilan fonctionnel, métabolomique, statut redox), et intégrés dans un programme global d’alimentation anti-inflammatoire, pauvre en toxines, riche en polyphénols, en fibres prébiotiques et en aliments régénérants.
Approches corps-esprit et réparation du traumatisme (12,13))
Le CDR est intimement lié à la perception du danger, non seulement biologique, mais aussi émotionnel et relationnel. Des études ont démontré que les traumatismes précoces, notamment ceux survenant durant la petite enfance (abus, négligence, insécurité chronique), modifient durablement la régulation neurovégétative, la réponse immunitaire et le métabolisme mitochondrial. Le système nerveux autonome se fige dans un mode de vigilance, avec une dominance sympathique (hypervigilance) ou vagale dorsale (inhibition, figement). Dans ce contexte, certaines approches psycho-corporelles visent à reprogrammer la réponse de sécurité au niveau profond du corps, et peuvent contribuer à lever un CDR figé. Parmi les plus prometteuses :
- Somatic Experiencing® (Peter Levine) : vise à libérer les charges traumatiques accumulées dans le système nerveux autonome sans revivre les événements. Elle travaille sur les sensations corporelles fines et les micro-mouvements de résolution.
- Thérapie Polyvagale (Stephen Porges) : basée sur la théorie polyvagale, elle cible le nerf vague ventral pour restaurer un état de sécurité relationnelle et de régulation émotionnelle. Elle utilise des pratiques vocales, respiratoires et de co-régulation sociale.
- Internal Family Systems (IFS) : approche psychothérapeutique centrée sur la reconnaissance et la réintégration des « parts » blessées, souvent liées à des traumas précoces, permettant une désactivation en profondeur des mécanismes de protection cellulaire chronique.
Ces pratiques partagent un objectif commun : redonner au corps un signal de sécurité suffisant pour désactiver le mode de défense chronique. Elles ne se substituent pas aux soins biologiques mais les complètent en agissant sur le socle neuro-affectif de la maladie chronique. Ces approches doivent être intégrées avec finesse, selon la capacité du patient à tolérer l’introspection ou la réintégration corporelle, souvent difficile après des années de dissociation. Lorsqu’elles sont bien menées, elles deviennent de puissants catalyseurs du retour à l’homéostasie cellulaire.
Toutes ces technologies et approches innovantes, bien que complémentaires, doivent s’intégrer à une stratégie globale : détoxification, soutien psycho-émotionnel, modulation vagale, et restauration du lien social. L’objectif est toujours de redonner à la cellule et au système sa capacité à sentir la sécurité, pour sortir du mode défense et retrouver le chemin de la réparation. Il ne faut pas oublier de favoriser l’exposition progressive à la nature, aux cycles, aux régénérations lentes de la vie organique.
L’hormèse : un stress pour guérir (14-16)

Paradoxalement, ce n’est pas toujours dans la protection maximale que la cellule trouve sa voie de sortie du CDR. Il arrive que ce soit par une stimulation adaptative, un micro-traumatisme bien calibré, que la voie de la résolution se réouvre. C’est le principe de l’hormèse, ou plus précisément de la mitohormèse. Ce terme décrit un phénomène biologique universel : de faible dose d’un stress (oxydatif, thermique, mécanique, hypoxique) peuvent renforcer les capacités adaptatives de l’organisme à condition que ce stress soit transitoire, suivi d’une phase de repos et que la cellule dispose de réserves pour y répondre. Naviaux reconnait que certains patients, à certaines phases de leur rétablissement peuvent bénéficier de ces signaux perturbateurs doux. Ce sont les fameuses thérapies de stress positif :
- Exposition au froid ou à la chaleur (cryothérapie, sauna)
- Jeûne intermittent ou restriction calorique douce
- Exercice physique adapté, à intensité modulée
- Hypoxie intermittente ou exercices respiratoires
Ces interventions créent des écarts temporaires à l’homéostasie, suffisamment brefs pour éviter la surcharge mais assez intenses pour activer les voies de signalisation cellulaire qui préparent à la résilience. Les mitochondries jouent ici un rôle clé : ce sont elles qui enclenchent des programmes de protection adaptative (via Nrf2, FOXO ; PGC1-alpha). L’hormèse bien conçue, peut ainsi devenir un signal de relance de la guérison cellulaire, une manière de dire à la cellule : « tu peux recommencer à vivre, car tu es assez forte pour t’adapter ». C’est une médecine de l’encouragement biologique, de la petite mise à l’épreuve qui réanime.
Une nouvelle médecine, une nouvelle écologie du soin
Cette médecine cellulaire ne détruit pas les paradigmes anciens, elle les dépasse, en leur rajoutant une dimension oubliée : celle de la dynamique vitale, de la guérison an tant que processus biologique autonome. Dans un monde saturé de diagnostics, où l’on confond parfois la cause avec le destin biologique, ce modèle nous rappelle que guérir, c’est permettre aussi au corps de réapprendre à se réparer. Cette vision de la médecine est encore jeune et a besoin d’essais cliniques rigoureux, et de validations croisées, d’interfaces croisées entre les disciplines. Mais elle porte en germe une promesse rare : celle d’une médecine qui ne traite pas seulement la maladie, mais qui accompagne le vivant dans sa capacité à guérir. Face à l’épidémie mondiale de maladies chroniques, de fatigue inexpliquée, d’inflammations sourdes, de douleurs sans lésions, il faut une médecine du temps cellulaire ou la guérison devient possible en donnant les conditions à la cellule blessée pour se réparer.
Petit protocole de soutien cellulaire pour commencer à sortir d’un CDR figé
Ce protocole n’est pas un traitement médical universel. Il s’agit d’une approche globale d’hygiène cellulaire à adapter selon les besoins, les tolérances et le contexte médical de chacun, avec un professionnel de santé formé.
Sécuriser l’environnement physiologique
- Sommeil : minimum 7h30/nuit, coucher régulier, pas d’écran après 21h.
- Lumière naturelle : exposition matinale au soleil (10–15 minutes/jour).
- Digital detox : 1h sans écran matin et soir.
- Hydratation : 1,5 à 2L d’eau faiblement minéralisée/jour.
Relancer l’énergie mitochondriale
Nutrition régénérante
- 80 % d’aliments non transformés, riches en fibres végétales.
- Apport quotidien d’acides gras oméga-3 (huile de lin, sardines, maquereaux).
Micronutriments clés (2 mois minimum)
- CoQ10 : 100 mg/j (ubiquinol)
- Magnésium bisglycinate : 300–400 mg/j
- Zinc : 15–25 mg/j + Sélénium : 100 µg/j
- NADH : 250–500 mg/j (soutien du NAD+)
- Glutathion réduit ou NAC : 600 mg/j
Calmer l’alerte interne
Pratique quotidienne corps-esprit (20 min/j)
- Respiration vagale (cohérence cardiaque, 5s/5s)
- Méditation en pleine conscience
- Marche lente consciente en nature
Stimuler la réparation par l’hormèse douce (1 à 2x/semaine)
- Exposition au froid progressif : douche froide (30 sec à 2 min)
- Sauna doux ou hammam (15–20 min)
- Jeûne intermittent doux : 12 à 14h sans manger entre dîner et petit-déjeuner
- Exercice adaptatif : 20 min de marche rapide ou yoga tonique
Favoriser la résolution
Éviter les agents bloquants
- Éliminer lentement café, alcool, sucre raffiné, pesticides, perturbateurs endocriniens
- Évaluer si infections chroniques, métaux lourds ou toxines environnementales sont présents (par un praticien formé)
Un cas clinique emblématique : quand la guérison devient possible
Clémence, 38 ans, cadre dynamique dans une entreprise de design, consulte pour une fatigue persistante depuis plus d’un an. Tout a commencé par une infection virale banale, diagnostiquée comme une mononucléose due à l’EBV (Epstein-Barr Virus), à laquelle elle semblait avoir bien réagi au départ. Mais trois mois plus tard, la fatigue ne s’est pas résorbée — au contraire, elle s’est aggravée, accompagnée de brouillard cérébral, d’une intolérance marquée à l’effort, de douleurs diffuses dans les jambes, d’une hypersensibilité au stress et de troubles du sommeil. Les examens classiques ne révèlent rien d’anormal. Les sérologies confirment une ancienne infection à EBV, sans réactivation franche. On évoque une dépression, un burn-out, voire une fibromyalgie débutante, sans réponse significative aux traitements proposés.
Lorsqu’elle arrive en consultation spécialisée, Clémence est désespérée. Son discours est typique d’un syndrome d’activation du CDR : « J’ai l’impression que mon corps est resté figé depuis cette infection… comme si quelque chose en moi refusait de redémarrer. »
Un bilan métabolique élargi révèle un stress oxydatif important, une baisse du NAD+, une carence légère en magnésium et zinc, un déséquilibre du microbiote intestinal, et des marqueurs d’inflammation de bas grade. Son rythme circadien est perturbé par une hyperactivité vespérale et une insomnie d’endormissement. Un diagnostic fonctionnel est posé : syndrome de fatigue post-virale avec blocage probable du cycle de guérison cellulaire.
Un protocole multidimensionnel est mis en place, fondé sur les principes du modèle CDR :
– Nutrition cellulaire : réintroduction d’aliments riches en polyphénols, fibres prébiotiques, et supplémentation en NADH, CoQ10, magnésium, zinc, glutathion.
– Photobiomodulation : 3 séances hebdomadaires de 20 minutes en lumière rouge/infrarouge sur la nuque, le thorax et l’abdomen, pour relancer la respiration mitochondriale.
– Stimulation vagale et psychocorporelle : exercices quotidiens de respiration en cohérence cardiaque, marche lente en nature, et début d’un accompagnement en Somatic Experiencing®.
– Restauration du rythme veille/sommeil : exposition matinale à la lumière naturelle, arrêt des écrans en soirée, douche froide le matin.
– Détoxification douce : drainage hépatique par phytothérapie, réduction des sources environnementales de perturbateurs endocriniens, relance de l’élimination par sudation modérée (sauna doux).
Après 8 semaines, Clémence commence à percevoir une amélioration franche : le brouillard cérébral se dissipe, la récupération post-effort s’améliore, les douleurs s’atténuent. À 6 mois, elle a repris à mi-temps son activité professionnelle, dort mieux, et témoigne d’une « sensation de retour à la vie ». Ce cas illustre parfaitement la pertinence du modèle de Naviaux : la maladie chronique ne tenait pas ici à une persistance virale, mais à l’échec du signal de résolution. En restaurant les conditions biologiques de sécurité, on a permis à la cellule de relancer son programme de réparation.
Dr Antonello D’oro
Références
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- Robert K Naviaux « Perspective: Cell danger response Biology-The new science that connects environmental health with mitochondria and the rising tide of chronic illness » Mitochondrion 2020 Mar :51 :40-45
- Robert K Naviaux » Metabolic features and regulation of the healing cycle- a new model for chronic disease pathogenis and treatment » Mitochondrion ScienceDirect, 2013
- Robert K Naviaux « Incomplete Healing as a Cause of Aging: The Role Mitochondria and the Cell Danger Response » Biology 2019 May
- Robert K Naviaux « Metabolic features of chronic fatigue syndrome » Proc Natl Acad Sci USA 2016 Sep 13 ;113(37)
- Haohua Liu « Photobiomodulation therapy (PBMT) in skeletal muscle regeneration: A comprehensive review of mechanisms, clinical applications, and future directions » ScienceDirect Vol 53, june 2025,104634
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