Généralités
L’acné est une maladie dermatologique fréquente qui se caractérise par la présence de lésions cutanées variées, comprenant des comédons, points noirs et microkystes pouvant évoluer en kystes inflammatoires plus volumineux puis à long terme en des cicatrices persistantes.
Les personnes concernées sont plus souvent les garçons que les filles. L’acné apparaît dans 80 % des cas au moment de l’adolescence, parfois apparaissant à l’âge adulte.
Il existe de nombreux facteurs favorisants dont le plus incriminé est l’influence hormonale, particulièrement l’excès d’androgènes favorisant la production de sébum. Toutefois, les hormones féminines comme les œstrogènes jouent un rôle dans le climat hormonal de la fille. On constate toutefois un rôle ambivalent de la contraception hormonale dont certaines pilules vont réduire l’acné et d’autres l’augmenter. Il existe aussi des phases de recrudescence lors de certaines périodes de la femme comme la période prémenstruelle, la grossesse ou la ménopause.
La physiopathologie de l’acné débute par une production excessive de sébum influencée par le milieu hormonal. Les glandes sébacées peuvent être par la suite le lit d’infections bactériennes puis de réactions inflammatoires locales. Il s’agit le plus souvent d’une infection bactérienne due au Propionibacterium acnes qui est responsable d’un foyer inflammatoire local de la glande sébacée.
Rôle de l’alimentation dans la prise en charge de l’acné
Pendant longtemps, le lien entre la nutrition et l’acné a été controversé. Toutefois, aujourd’hui ce lien est bien accepté et fait même l’objet d’un consensus scientifique.
Les études médicales ont clairement démontré que le modèle alimentaire joue un rôle important dans le développement de l’acné, particulièrement une alimentation riche en sucres et féculents à index glycémique élevé ainsi que la consommation excessive de produits laitiers (1,2).
Des progrès récents en biologie médicale ont permis de montrer que certaines voies de signalisations intracellulaires appelées mTORC1 étaient déclenchées par notre alimentation moderne déséquilibrée.
L’activation de ces messagers intracellulaires (mTORC1) est associée non seulement à l’apparition précoce de l’acné, mais également par la suite à un certain nombre de maladies modernes. En effet, la persistance des messagers mTORC1 favorise plus tard des maladies telles que l’obésité, le diabète de type 2 et également plus tardivement le cancer ou les maladies neurodégénératives (3).
Ces messagers intracellulaires sont clairement suractivés sous deux grandes influences nutritionnelles : la charge glycémique élevée et l’alimentation trop riche en produits laitiers (sous l’influence des facteurs de croissance IGF-1). D’autre part, la leucine, un acide aminé que l’on trouve en bonne quantité dans les produits laitiers et la viande rouge, a été récemment accusée d’augmenter l’expression des messagers mTORC1 lorsqu’elle est consommée de façon excessive.
Dès lors, suite à ces découvertes, des recommandations nutritionnelles sont justifiées dans l’acné comprenant une réduction des hydrates de carbone (féculents) à index glycémique élevé ainsi qu’une réduction des produits laitiers riche en IGF-1 et des produits riches en leucine comme la viande rouge et les produits laitiers. Une diminution des messagers mTORC1 est observée lors d’une consommation régulière de végétaux et de fruits. Le but de ces modifications alimentaires n’est pas seulement de s’occuper de l’acné, mais également d’éviter par la suite les maladies activées par la persistance des messagers mTORC1 (diabète, obésité, cancer etc..) (4).
Approches classiques dermatologiques selon le stade de l’acné
L’acné débutante
L’acné débutante est due principalement à l’hyperproduction de sébum. Classiquement, cette atteinte débutante est traitée par des topiques locaux sous forme de gel ou de savon.
L’acné au stade inflammatoire
L’acné inflammatoire est un stade plus évolué caractérisé par des kystes et papules inflammatoires. Dans ce cas, la prise en charge classique comprend la prescription de rétinoïdes dérivés de la vitamine A ou d’antibiotiques locaux ou par la bouche.
L’acné au stade cicatriciel
La forme cicatricielle est liée à d’anciennes formes d’acné. Dans ce cas, il s’agit de traitement spécialisé de médecine esthétique.
Approches nutritionnelles et micronutritionnelles selon les stades de l’acné
L’acné débutante
Comme nous l’avons vu ci-dessus, l’acné débutante est caractérisée par une sécrétion excessive de sébum sous influence hormonale (androgènes) ainsi que par l’activation de messagers intracellulaires (mTORC1) due à une alimentation à index glycémique élevé favorisant également une production androgénique excessive.
Comme décrites ci-dessus, les solutions nutritionnelles comprennent une alimentation moins calorique avec des aliments à index glycémique plus faible, une réduction des produits laitiers en évitant l’excès de protéines animales, particulièrement la viande rouge.
L’acné au stade inflammatoire
La phase inflammatoire débute par une infection bactérienne due au Propionibacterium acnes qui colonise les glandes sébacées provoquant des réactions inflammatoires locales. Certains déficits en micronutriments, en diminuant les capacités de défenses immunitaires au niveau de la peau, pourraient favoriser le développement de l’acné.
C’est le cas plus particulièrement du zinc, en effet le déficit en zinc est associé à une susceptibilité plus importante d’infection au Propionibacterium acnés (5).
On retrouve également une corrélation entre la sévérité de l’acné et les niveaux de zinc dans le sang (6). Plusieurs études ont également souligné l’intérêt de la supplémentation en zinc dans l’acné (7,8).
De façon conjointe, on peut proposer des traitements topiques antibactériens comme l’huile essentielle de Tea Tree (9).
D’autre part, l’importance de la réaction inflammatoire locale au niveau de la peau est favorisée par une alimentation moderne inadaptée. Il est conseillé d’avoir une alimentation plutôt anti-inflammatoire riche en aliments contenant des oméga 3 et des polyphénols (fruits, légumes, épices) ainsi que de réduire les graisses TRANS et les huiles oméga 6 pro-inflammatoires.
Concernant les compléments alimentaires à visée anti-inflammatoire, on peut proposer de prescrire des huiles de poissons riches en oméga 3 (10) associés à des huiles riches en oméga 6 gamma-linolénique, par exemple comme l’huile de bourrache ou d’onagre (11).
Certains auteurs avancent l’hypothèse d’une connexion entre le cerveau, l’intestin et la peau (the gut-brain-skin connection). Ainsi, certains états émotionnels comme l’anxiété ou la dépression peuvent altérer le microbiote intestinal, augmenter la perméabilité intestinale et par conséquent contribuer à l’inflammation systémique et cutanée. Dans ce cas, la prise de probiotiques peut aider à réduire l’inflammation systémique et par conséquent avoir un impact sur l’acné (12)
La phase cicatricielle
La persistance d’une inflammation chronique est accompagnée d’un stress oxydant provoquant au niveau cutané des altérations cellulaires dans les processus de réparation et de cicatrisation des lésions avec comme conséquence des séquelles cicatricielles disgracieuses. Certains travaux suggèrent que le stress oxydant joue un rôle dans la progression de l’acné d’autant plus que les défenses antioxydantes sont faibles (13,14). Dès lors, dans les formes d’acné avancées et rebelles, la prise d’antioxydants peut être une stratégie à conseiller permettant de réduire la progression de l’acné et ces altérations cicatricielles (15).
L’acné, une approche intégrée
Nous avons vu que les approches nutritionnelles et micronutritionnelles sont nécessaires et incontournables dans la prise en charge de l’acné.
D’autre part, ces approches peuvent également être complémentaires lors de traitements classiques. Ainsi, lors de la prise de contraceptifs oraux, il est judicieux de favoriser une détoxification hépatique (par exemple avec la sylimarine) et intestinale (probiotiques), idem lors de la prise d’antibiotiques (ce que je déconseille au vu de l’impact désastreux sur le microbiote). La prise d’antioxydants permet également de réduire les effets secondaires des rétinoïdes tels que la peau sèche et l’érythème cutané (16).
Il ne faut pas oublier d’envisager un soutien psychologique, car une acné rebelle chez un adolescent peut être un frein à la relation favorisant la perturbation de l’image de soi et entraînant des états d’anxiété et une dévalorisation de soi.
En pratique
Alimentation
- réduire les aliments à index glycémique élevé,
- réduire les produits laitiers
- réduire l’alcool et la viande rouge en excès
- augmenter la consommation de végétaux colorés et d’oméga 3
Compléments alimentaires selon les stades peuvent comprendre
- Zinc environ 30mg élément (selon dosage)
- EPA et DHA 750 mg à 1gr par jour
- Huile de Bourrache environ 500 mg/j
- Antioxydants, favoriser un complexe pouvant contenir: des polyphénols (par exemple : extrait de thé vert, quercétine, resvératrol etc..), du sélénium, de la vitamine E, du béta carotènes etc..
- Probiotiques à prendre à bonne dose sur plusieurs mois
Références :
- High glycemic load diet, milk and ice cream consumption are related to acné vulgaris in Malaysian Young adults : a case control study Ismail NH, BMC Dermatol 2012 Aug 16 ; 12-13
- A low glycemic load diet improves symptoms in acné vulgaris patients : a randomized controlled trial Smith RN Am J Clin Nutr 2007 Jul ;86(1) :107-15
- Diet in acne : further évidence for the rôle of nutrient signalling in acné pathogenesis. Melnik BC Acta Derm Venereol, 2012 May ;92(3) :228-31
- Dietary intervention in acne : Attenuation of increased mTORC1 signalling promoted by Western Diet, Melnik B Dermato endocrinol 2012 Jan 1 ;4 :20-32
- Susceptibility of Propionibacterium acnés isolated from patients with acné vulgaris to zinc ascorbate and antibiotics Linuma K Clin Cosmet Investig Dermatol 2011 ;4 :161-5
- Correlation between the severity and type of acne lésions with sérum zinc levels in patients with acné vulgaris Rostami Mogaddam, Biomed Res Int, 2014 ;:474108
- Zinc therapy in dermatology : a review Dermatol Res Pract. 2014 :709152
- Oral zinc sulphate therapy in acné vulgaris : a double-blind trial. Acta Derm Venereol 1980 ;60(4) :337-40
- A review of applications of tea tree oil in dermatology. Pazyar N. Int J DErmatol 2013 Jul :52(7) : 784-90
- Effects of fish oil supplementation on inflammatory acné. Khavev G Lipids Health Dis. 2012 Dec 3 ;11 :165
- Effects of dietary supplementation with oméga 3 fatty acid and gamma-linolenic acid on acné vulgaris : a randomised, double-blind, controlled trial. Acta Derm Venereol 2014 Sep ; 94(5) : 521-5
- Acne vulgaris, probiotics and the gut-brain-skin connection- back to the future ? Whitney P Bowe, Gut Pathogens 2011 3 :1
- Oxydants and anti-oxydants status in acné vulgaris patients with varying severity Al-Shobaili HA, Ann Clin Lab Sci 2014 Spring ;44(2) :202-7
- Evaluation of sérum vitamins A and E and zinc levels according to the severity of acné vulgaris, Ozuguz P Cutan Ocul Toxicol 2014 Jun :33(2) :99-102
- Acne vulgaris : the rôle of oxidative stress and the potential therapeutic value of local and systematic antioxydants. Bowe WP, J Drugs Dermatol, 1212 Jun :11(6) :742-6
- A dietary suppléments to reduce side effects of oral isoretinoin therapy in acné patients. Fabbrocini G G Ital Dermatol Venereol 2014 Aug ;149(4) :441-5
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bonjour,
je suis micronutritionniste basée dans le nord de la France. je découvre seulement votre excellent blog aujourd’hui…il est formidable! Bravo à vous, j’espère arriver un jour à ce niveau pour mon propre blog (qui se veut un peu plus simple et adapté à une population moins informée).
Juste une remarque additionnelle concernant l’acné et la micronutrition…J’ai aussi noté un fort lien entre un foie un peu engorgé et l’acné. Des poussées d’acné au niveau du menton, notamment à l’age adulte, est étroitement corrélé avec le foie et une bonne cure détox (chardon marie + artichaut + romarin voire radis) peut aider à améliorer cela
sabrina